A la veille de la manifestation « « Cullettivu per a Demucrazia è u Rispettu pè u populu corsu », les présidents de l’Assemblée de Corse et de l’Exécutif territorial n’ont pas caché leur détermination à en découdre avec le gouvernement malgré les refus. Leurs discours respectifs ont appelé également au dialogue et à la paix.
Le discours de Jean-Guy Talamoni : « Nous avons toujours été ouverts au dialogue. Toujours, malgré tous les refus essuyés depuis des années, malgré le déni chronique de la démocratie »
« « Il y a en Corse un fait nouveau, spectaculaire, il faut donc entamer les discussions ». Ces mots ne sont pas les miens mais ceux d’un célèbre éditorialiste parisien. La victoire de notre majorité en décembre dernier est incontestable et doit être interprétée comme la volonté des Corses d’aboutir à une solution politique pour la Corse. Nombreux sont aujourd’hui les observateurs à s’accorder sur ce point. Dans les médias et parmi les politiques. La Corse, et notre majorité, a reçu plusieurs soutiens, notamment celui des Régions de France, par la voix d’Hervé Morin. Le Président du groupe LREM à l’Assemblée Nationale française, Richard Ferrand, a, lui aussi, invité le gouvernent à accepter la « main tendue ».
En effet, nous sommes allés à Paris la semaine dernière avec la volonté de discuter de manière loyale, comme nous l’avons fait depuis 2015. De discuter de manière loyale avec le premier ministre, avec le Président du Sénat, avec le Président de l’Assemblée Nationale. En allant à Paris rencontrer Edouard Philippe, Gérard Larcher et François de Rugy, notre objectif n’était pas d’entretenir le conflit. Nous y sommes allés dans une logique d’apaisement, pour ouvrir un dialogue, sans préalable et sans tabou. Nous sommes allés à Paris avec la volonté ferme de défendre la dimension politique de la question corse.
Nous avons toujours été ouverts au dialogue. Toujours, malgré tous les refus essuyés depuis des années, malgré le déni chronique de la démocratie.
Revenons un instant sur l’histoire des relations entre la Corse et Paris.
Durant 40 ans, l’Etat a fait de l’arrêt de la clandestinité un préalable aux discussions. Pour autant, il n’y a eu aucune discussion depuis 2014, date à laquelle le FLNC a décidé sa sortie de la clandestinité sans qu’aucune action ne soit venue depuis contredire cette décision.
Durant la mandature 2010/2015, l’Assemblée de Corse a délibéré sur des sujets majeurs pour la Corse, tels que le statut de résident, la coofficialité de la langue corse et de la langue française ou l’amnistie pour les prisonniers politiques. Paris n’a jamais pris en compte ces délibérations, parlant même aujourd’hui des « revendications nationalistes », jamais de délibérations, ignorant ainsi complètement le vote démocratique, d’une majorité de gauche d’ailleurs, même si les démarches ont été initiées par les nationalistes.
Durant 40 ans, on nous a dit que nos idées n’étaient pas majoritaires et que, de fait, on ne pouvait les prendre en compte. Peu à peu, avec les associations, avec les syndicats et avec l’engagement militant et culturel, nous avons gagné « la bataille des idées », bien avant de gagner la bataille électorale en 2015. Même l’un de nos plus ardents opposants, Nicolas Alfonsi, que je salue, l’a reconnu. Pourtant, il n’y a pas eu de dialogue.
Au printemps 2017, les Corses ont élu trois députés nationalistes à l’Assemblée Nationale française. On nous a dit alors que nous n’avions pas la majorité absolue et qu’il fallait attendre les résultats des territoriales des décembre 2017. L’Etat a toujours modifié les règles du jeu mais, à chaque fois, avec la confiance des Corses, nous avons gagné la partie.
Alors, en votant massivement pour Per a Corsica, notre peuple a dit que la Corse n’est pas une entité administrative. Il a dit que la Corse est une nation. Si, comme l’auteur français Ernest Renan, les responsables parisiens considèrent la nation comme « un plébiscite de tous les jours », ils doivent reconnaître le plébiscite fait par les Corses chaque jour durant deux ans et confirmé, de manière formelle par le scrutin, trois fois en deux ans.
Je le disais, nous sommes allés à Paris avec notre bonne volonté. Eux ont pensé que nous étions faibles. Là où nous attendions au moins des propositions de solutions équilibrées, Paris nous a proposé un retour au droit commun, un retour en arrière, avant 1981 ! Rien n’était possible ! Quand on connaît l’histoire et le droit, on ne peut pas accepter ces réponses. Parce que le droit suit toujours la volonté politique. Concernant l’amnistie, plusieurs faits historiques prouvent qu’il est possible de trouver des solutions de compromis. Au niveau de la lutte contre la spéculation foncière et immobilière, des dispositifs juridiques existent à travers l’Europe. Il existe aussi des dispositifs juridiques propres à certaines régions françaises, fondés sur leur histoire, comme à Saint Barthélémy…
Compte tenu de ce que nous demandons dans les domaines de la langue, de la fiscalité, du foncier ou des institutions, si nous n’obtenons pas un dispositif spécifique pour la Corse, il y aura toujours d’autres articles ou des principes constitutionnels à nous opposer. Et on sait que la Conseil constitutionnel ne manque jamais une occasion de le faire lorsqu’il s’agit de la Corse. Nous l’avons vu pour la fiscalité du patrimoine.
En résumé, aujourd’hui, par rapport au gouvernement précédent, seuls la forme des discussions et le vocabulaire employé ont changé. Le fond, pour le moment, reste identique. Paris continue de nous opposer ces fameuses « lignes rouges » définies en d’autres temps. Accepter la proposition qui consisterait à modifier l’article 72 de la Constitution, reviendrait à renoncer à ce que nous sommes, ce serait trahir le mandat que nous ont confié les Corses.
Nous présenterons aujourd’hui une résolution portant sur notre demande de dialogue sans tabou et sans lignes rouges. Nous demanderons le rapprochement de tous les prisonniers politiques, nous demanderons l’inscription de la Corse dans la Constitution pour pouvoir déroger au droit commun dans les domaines de la fiscalité, du foncier et de la langue. Enfin, nous demanderons une réévaluation des ressources et des moyens de la Collectivité de Corse afin de répondre aux besoins de la société corse.
Nous descendrons demain dans la rue, aux côtés de toutes les forces vives de l’île, pour que le fait démocratique soit respecté. Avec elles, nous dirons au Président de la République française qu’il ne doit pas trahir son discours de Furiani, lorsqu’il était candidat à l’élection. Nous lui dirons que le moment est venu d’accompagner les efforts des institutions corses dans la construction de relations enfin apaisées entre notre peuple et Paris.
Et après cette manifestation, nous continuerons sans relâche à construire notre nation car, pour reprendre à nouveau les mots d’Ernest Renan, nous avons fait de grandes choses ensemble et nous voulons en faire encore ».
Le discours de Jean-Guy Talamoni : « Nous avons toujours été ouverts au dialogue. Toujours, malgré tous les refus essuyés depuis des années, malgré le déni chronique de la démocratie »
« « Il y a en Corse un fait nouveau, spectaculaire, il faut donc entamer les discussions ». Ces mots ne sont pas les miens mais ceux d’un célèbre éditorialiste parisien. La victoire de notre majorité en décembre dernier est incontestable et doit être interprétée comme la volonté des Corses d’aboutir à une solution politique pour la Corse. Nombreux sont aujourd’hui les observateurs à s’accorder sur ce point. Dans les médias et parmi les politiques. La Corse, et notre majorité, a reçu plusieurs soutiens, notamment celui des Régions de France, par la voix d’Hervé Morin. Le Président du groupe LREM à l’Assemblée Nationale française, Richard Ferrand, a, lui aussi, invité le gouvernent à accepter la « main tendue ».
En effet, nous sommes allés à Paris la semaine dernière avec la volonté de discuter de manière loyale, comme nous l’avons fait depuis 2015. De discuter de manière loyale avec le premier ministre, avec le Président du Sénat, avec le Président de l’Assemblée Nationale. En allant à Paris rencontrer Edouard Philippe, Gérard Larcher et François de Rugy, notre objectif n’était pas d’entretenir le conflit. Nous y sommes allés dans une logique d’apaisement, pour ouvrir un dialogue, sans préalable et sans tabou. Nous sommes allés à Paris avec la volonté ferme de défendre la dimension politique de la question corse.
Nous avons toujours été ouverts au dialogue. Toujours, malgré tous les refus essuyés depuis des années, malgré le déni chronique de la démocratie.
Revenons un instant sur l’histoire des relations entre la Corse et Paris.
Durant 40 ans, l’Etat a fait de l’arrêt de la clandestinité un préalable aux discussions. Pour autant, il n’y a eu aucune discussion depuis 2014, date à laquelle le FLNC a décidé sa sortie de la clandestinité sans qu’aucune action ne soit venue depuis contredire cette décision.
Durant la mandature 2010/2015, l’Assemblée de Corse a délibéré sur des sujets majeurs pour la Corse, tels que le statut de résident, la coofficialité de la langue corse et de la langue française ou l’amnistie pour les prisonniers politiques. Paris n’a jamais pris en compte ces délibérations, parlant même aujourd’hui des « revendications nationalistes », jamais de délibérations, ignorant ainsi complètement le vote démocratique, d’une majorité de gauche d’ailleurs, même si les démarches ont été initiées par les nationalistes.
Durant 40 ans, on nous a dit que nos idées n’étaient pas majoritaires et que, de fait, on ne pouvait les prendre en compte. Peu à peu, avec les associations, avec les syndicats et avec l’engagement militant et culturel, nous avons gagné « la bataille des idées », bien avant de gagner la bataille électorale en 2015. Même l’un de nos plus ardents opposants, Nicolas Alfonsi, que je salue, l’a reconnu. Pourtant, il n’y a pas eu de dialogue.
Au printemps 2017, les Corses ont élu trois députés nationalistes à l’Assemblée Nationale française. On nous a dit alors que nous n’avions pas la majorité absolue et qu’il fallait attendre les résultats des territoriales des décembre 2017. L’Etat a toujours modifié les règles du jeu mais, à chaque fois, avec la confiance des Corses, nous avons gagné la partie.
Alors, en votant massivement pour Per a Corsica, notre peuple a dit que la Corse n’est pas une entité administrative. Il a dit que la Corse est une nation. Si, comme l’auteur français Ernest Renan, les responsables parisiens considèrent la nation comme « un plébiscite de tous les jours », ils doivent reconnaître le plébiscite fait par les Corses chaque jour durant deux ans et confirmé, de manière formelle par le scrutin, trois fois en deux ans.
Je le disais, nous sommes allés à Paris avec notre bonne volonté. Eux ont pensé que nous étions faibles. Là où nous attendions au moins des propositions de solutions équilibrées, Paris nous a proposé un retour au droit commun, un retour en arrière, avant 1981 ! Rien n’était possible ! Quand on connaît l’histoire et le droit, on ne peut pas accepter ces réponses. Parce que le droit suit toujours la volonté politique. Concernant l’amnistie, plusieurs faits historiques prouvent qu’il est possible de trouver des solutions de compromis. Au niveau de la lutte contre la spéculation foncière et immobilière, des dispositifs juridiques existent à travers l’Europe. Il existe aussi des dispositifs juridiques propres à certaines régions françaises, fondés sur leur histoire, comme à Saint Barthélémy…
Compte tenu de ce que nous demandons dans les domaines de la langue, de la fiscalité, du foncier ou des institutions, si nous n’obtenons pas un dispositif spécifique pour la Corse, il y aura toujours d’autres articles ou des principes constitutionnels à nous opposer. Et on sait que la Conseil constitutionnel ne manque jamais une occasion de le faire lorsqu’il s’agit de la Corse. Nous l’avons vu pour la fiscalité du patrimoine.
En résumé, aujourd’hui, par rapport au gouvernement précédent, seuls la forme des discussions et le vocabulaire employé ont changé. Le fond, pour le moment, reste identique. Paris continue de nous opposer ces fameuses « lignes rouges » définies en d’autres temps. Accepter la proposition qui consisterait à modifier l’article 72 de la Constitution, reviendrait à renoncer à ce que nous sommes, ce serait trahir le mandat que nous ont confié les Corses.
Nous présenterons aujourd’hui une résolution portant sur notre demande de dialogue sans tabou et sans lignes rouges. Nous demanderons le rapprochement de tous les prisonniers politiques, nous demanderons l’inscription de la Corse dans la Constitution pour pouvoir déroger au droit commun dans les domaines de la fiscalité, du foncier et de la langue. Enfin, nous demanderons une réévaluation des ressources et des moyens de la Collectivité de Corse afin de répondre aux besoins de la société corse.
Nous descendrons demain dans la rue, aux côtés de toutes les forces vives de l’île, pour que le fait démocratique soit respecté. Avec elles, nous dirons au Président de la République française qu’il ne doit pas trahir son discours de Furiani, lorsqu’il était candidat à l’élection. Nous lui dirons que le moment est venu d’accompagner les efforts des institutions corses dans la construction de relations enfin apaisées entre notre peuple et Paris.
Et après cette manifestation, nous continuerons sans relâche à construire notre nation car, pour reprendre à nouveau les mots d’Ernest Renan, nous avons fait de grandes choses ensemble et nous voulons en faire encore ».
Le discours de Gilles Simeoni, président du Conseil exécutif : « Si la porte du dialogue s'ouvre, le peuple corse, dans la diversité de ses convictions et de ses forces, saura montrer qu'il est prêt à construire un présent et un avenir qui seront ceux de l'émancipation ».